Pour en finir avec le parisianisme.
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Pour en finir avec le parisianisme

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Vivre et philosopher même à Arras

Par Dominique Catteau

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Pensez vous comme Montaigne "que philosopher c'est apprendre à mourir" ou que philosopher à Arras, c'est apprendre à vivre avec bonheur ? Le preuve bien vivante et pleine d'esprit en est l'auteur de ce récit, heureux de son sort. Ses souvenirs personnels viennent forcément bousculer les vérités définitives du prêt à penser parisien, édictées pour coiffer la "province" et qu'il ne se prive pas de passer au peigne fin d'un humour sans prétention. Arras ne sera jamais Paris et ainsi sera sauvée son âme qui qu'en grogne : mais Arras n'est pas non plus le dernier réduit où se faire "limoger". Par delà les beffrois et les clochers, il s'adresse à tous les lecteurs prêts à reconnaître que philosopher ainsi n'a rien d'harassant.

Fiche technique

Référence
460376
ISBN
9782350303765
Hauteur :
17,8 cm
Largeur :
12 cm
Nombre de pages :
160
Crédit photo
de couverture: Florence Yvé-Duhaut

AVANT-PROPOS
GENRE ?
INDÉCISION ?
NEMETACUM ?
COIFFEURS ?
AMOURS ?
COLLÈGUES ?
PRIMUM VIVERE, DEINDE PHILOSOPHARI ?
POUR FINIR ?

Dominique Catteau est un professeur de philosophie nordiste qui fut par deux fois nommé à Arras, au lycée Robespierre, puis à l'IUFM-université d'Artois. Sa vie, sa carrière et son œuvre (notamment sur la musique et sur divers problèmes de société contemporains) apportent un démenti plein de vie à la sentence sans appel que lui asséna le parisianisme universitaire : "on ne vit pas à Arras, on y meurt". Entre-temps, on peut même y philosopher.

Lors du congrès de Saint-Pétersbourg dont j’ai déjà parlé, je fus ainsi assailli, dès la fin de mon exposé, par toute une grappe de chers collègues venus me féliciter :
“Cher ami, vous avez été brillant, dit l’un.
— Votre exposé était d’une limpidité admirable, ajouta un autre.
— Quelle aisance dans votre discours! C’était un bonheur de vous écouter, renchérit un troisième.
— Et quelle profondeur de vues! Vous avez traité votre sujet avec une érudition absolument impressionnante, rajouta un quatrième qui ne voulait pas rester à la traîne.
— Vos étudiants ont bien de la chance d’avoir un tel enseignant !” s’exclama un dernier.
Je bafouillais tant bien que mal des remerciements gênés, en manquant d’être pris de vertige à force de tourner la tête de tous les côtés à la fois. Quand, au beau milieu de ce péan, une voix féminine prit soudain le dessus :
“Oh! Mais qu’est-ce qu’il fait donc à Arras ?…” vocalisa-t-elle lentement en arpèges suraigus, dont la mélodie criarde s’est à jamais fichée dans mon oreille.
C’était la blonde épouse d’un des spécialistes présents. Était-elle elle-même spécialiste de quoi que ce soit? Je ne sais, mais le colloque n’avait pas été honoré de sa communication, même si, assurément, il avait été décoré de sa présence ornementale. Était-elle seulement universitaire? Je ne le sais pas davantage. Mais c’est sûr, elle était parisienne. Et de la meilleure farine.
Qu’avait-elle voulu dire avec son interrogation impromptue à peu près autant qu’un cheveu sur la soupe ? Une haute inspiration, cela va sans dire : d’après son soupir langoureux, j’étais tellement bon que je n’aurais dû être en poste à Arras, ma présence en cette province reculée y était une insulte à la connaissance, un pied-de-nez au bon goût intellectuel. Bien sûr, le sous-entendu s’entendait à mille lieues à la ronde : j’aurais dû être là où la sphère de l’intelligence rayonne sur le monde intimidé et reconnaissant, à Paris, capitale de tout ce qui est et de tout ce qui doit être.
Avec le rebond d’une balle de ping-pong, je m’entends encore lui répondre, un sourire au coin des lèvres:
“Mais vous savez, Madame, je suis très heureux à Arras. Je suis ainsi fait que j’ai besoin de voir des vaches au bout de mon jardin.”
J’ai bien l’impression que mon interlocutrice comprit que, ce disant, je l’incluais sans façon dans le genre des bovidés, à moins même qu’elle ne subodorât que ma hiérarchie personnelle des valeurs menaçait de la placer elle-même au-dessous de ces bons ruminants auxquels nous devons tant.
Qu’y faire? Devant la sottise, il m’arrive souvent de manquer de tact et de savoir-vivre et, à force de ne pas savoir dissimuler, de lâcher, plus ou moins sans le vouloir, quelques bonnes petites vérités. Ainsi parle un descendant de paysans flamands.